Annulation des poursuites pour harcèlement sexuel par le tribunal correctionnel de Paris

Le 8 juin 2012, la 31ème Chambre du Tribunal correctionnel de Paris a prononcé « l’extinction de l’action publique » dans la procédure pour harcèlement sexuel opposant Mme F. et l’AVFT à M. M.

Mme F. avait porté plainte pour agressions sexuelles et harcèlement sexuel en février 2008.

Après quatre ans et demi d’instruction, la Chambre de l’instruction avait ordonné le renvoi devant le Tribunal correctionnel de M. M. pour harcèlement sexuel, laissant de côté la qualification d’agressions sexuelles, alors que le mis en cause avait reconnu de nombreux attouchements à caractère sexuel.

A l’audience, la victime, représentée par Me Katz et Mme Amoussou représentant la constitution de partie civile de l’AVFT, ont demandé au tribunal de restituer aux faits, comme il en a l’obligation et conformément aux instructions données par voie de circulaire par la Chancellerie, leur exacte qualification.

L’AVFT a rappelé la jurisprudence de la cour de cassation(1) qui précise le cadre dans lequel les juridictions peuvent requalifier les faits qui leur sont soumis au stade de leur jugement, conditions réunies en l’espèce.

Me Katz a rappelé « l’incurie de l’Etat et du législateur » alertés par l’AVFT sur les carences de la loi avant qu’elle ne soit abrogée.

Le parquet s’est quant à lui opposé à une requalification en agression sexuelle au motif que le tribunal était saisi en droit d’une unique qualification de harcèlement sexuel. Il a pourtant requis une requalification alternative d’appels téléphoniques malveillants, à condition que le mis en cause accepte de comparaître sur le fondement de cette qualification.

Les parties civiles ont contesté cette analyse, rappelant que le Tribunal était saisi in rem c’est-à-dire des faits et non d’une qualification juridique et qu’ils ont non seulement le pouvoir mais aussi le devoir de leur rendre leur véritable qualification.

Mme F. quant à elle refuse « une justice au rabais » et donc une qualification d’appels téléphonique malveillants.

L’avocat de M. M. a affirmé que son client « avait fini par se sentir harcelé par cette affaire » a contesté qu’il faille « à tout prix trouver quelque chose pour « réconforter Mme F. », a affirmé qu’il « qu’il serait justice de laisser son client tranquille » et qu’il fallait éviter « de se laisser guider par l’émotion ».

Me Katz s’est insurgé contre ses propos en recadrant le débat, affirmant qu’il ne s’agissait pas de réconfort et d’émotion mais de droit.

Après 25 minutes de délibéré, le Tribunal a prononcé l’extinction de l’action publique.

La présidente du Tribunal, après avoir rendu son délibéré, s’est permise de reprocher aux parties civiles de ne pas avoir invoqué le volet pénal du harcèlement sexuel dans le Code du travailL1155-2 du Code du travail, alors même que, d’une part, la circulaire de la Chancellerie le déconseille(2) et, d’autre part, qu’il ne s’appliquerait de toute façon pas à Mme F., agente de la fonction publique ne relevant pas des dispositions du Code du travail.

Depuis l’abrogation du délit de harcèlement sexuel, aucune requalification n’a été décidée dans les procédures dans lesquelles l’AVFT intervient.

Contacts :
Marilyn Baldeck, déléguée générale
Gisèle Amoussou, juriste, en charge du « dossier ».

Notes

1. Cass. crim. 30 janvier 2008

2. « Force est toutefois de constater que l’incrimination issue de la combinaison des article L1153-1 et L1155-2 du Code du travail n’est pas rédigée de manière plus précise que le texte de l’article 222-33 du Code pénal. Dans un souci de sécurité juridique, il sera donc opportun de privilégier les poursuites sous d’autres qualifications (…) »

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