Condamnation d’un club de sport du Val d’Oise pour harcèlement sexuel à l’encontre d’une animatrice salariée.

Le Conseil de prud’hommes de Montmorency a déclaré nul le licenciement pour inaptitude de Mme S., du fait du harcèlement sexuel commis par les adhérents.

L’AVFT était partie intervenante volontaire.

Mme S, entraîneuse physique spécialisée, a rapidement constaté une ambiance extrêmement sexiste et à connotation sexuelle : attribution de notes pour les fesses des adhérentes, remarques sexuelles humiliantes (« Elle, je la prendrais bien en levrette mais avec un sac sur la tête »), « blagues » sexuelles concernant les femmes, vidéo ou photos de femmes nues (parfois leurs « petites amies ») sur les téléphones portables imposées à la vue de certain-e-s, propos dévalorisants et humiliants sur leurs compagnes, étalage de leur vie sexuelle etc.
Elle-même doit subir de nombreux comportements à connotation sexuelle de la part de certains adhérents : remarques sur le physique et les tenues vestimentaires, regards déshabilleurs, gémissements, questions sur sa vie intime et sexuelle, propositions sexuelles explicites, calomnies concernant sa prétendue vie sexuelle ou encore mimes d’actes sexuels (« t’es trop maigre, t’as pas de seins », « mmh, elle aime bien se faire peloter » ;bon tu viens, je vais te sodomiser dans le sauna ? »).
Ces remarques et commentaires sont d’autant plus fréquents, agressifs et insultants, qu’elle tente de faire respecter le règlement : ne pas crier dans la salle, renouveler leur cotisation, mettre une tenue adaptée ou ranger le matériel.

Aucun des membres du bureau, adhérents et donc parfois témoins, n’intervient jamais pour rappeler les règles les plus élémentaires de respect.
Pendant quatre ans, sa santé se dégrade petit à petit, jusqu’à ce qu’elle finisse par être arrêtée, la principale réaction du bureau étant de lui reprocher de ne pas savoir s’affirmer face aux adhérents.

Le médecin du travail, à qui elle relate ses conditions de travail, la déclare finalement inapte 10 mois plus tard.

Elle saisit alors le conseil de prud’hommes de Montmorency pour faire déclarer la nullité de son licenciement et obtenir réparation pour la perte de son emploi et du fait des agissements de harcèlement sexuel(1). A sa demande, l’AVFT intervient volontairement à ses côtés dans la procédure.

Le conseil de prud’hommes, dans sa formation paritaire(2), après avoir écouté les parties avec attention, a reconnu le harcèlement sexuel et condamné l’association sportive :

  • Le conseil a utilisé la loi du 27 mai 2008(3) inspirée de la directive européenne, applicable au civil, pour qualifier les agissements dénoncés de harcèlement sexuel ;
  • Il a constaté que l’inaptitude avait pour origine la faute de l’employeur et le harcèlement sexuel et a fait une exacte application de l’article L1153-4 du code du travail, en déclarant le licenciement nul ;
  • La totalité des demandes indemnitaires de Mme S et de l’AVFT ont été accordées : 12 000? d’indemnités pour licenciement nul, 12 000? pour dommages et intérêts liés au harcèlement pour Mme S. L’AVFT, dans le cadre de son intervention volontaire, a obtenu 1500 ? au titre du préjudice moral.

L’employeur a interjeté appel de cette décision ce qui, compte tenu des délais d’audiencement, repousse à environ un an et demi l’issue de cette procédure. Ces délais sont d’ailleurs une des causes de renoncement des salarié-e-s aux procédures prud’homales, particulièrement en Ile-de-France.

Contact : Gwendoline Fizaine, 01 45 84 24 24

Notes

1. Mme S était représentée par Me Beckers, avocate au barreau de la Seine Saint Denis

2. Deux conseillères issues des syndicats salariés et deux conseillères issues des syndicats employeurs

3. Loi n° 2008-496 : « tout agissement à connotation sexuelle, subi par une personne et ayant pour objet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant et offensant », ce qui correspond particulièrement aux agissements dénoncés par Mme S.

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