Après la condamnation de l’Etat français par la Cour Européenne des Droits des l’Homme, le 20 décembre 2012, la Cour de cassation a ordonné le réexamen de la condamnation de Mme K pour dénonciation calomnieuse

Le 5 décembre 2001, Mme K, dont la plainte pour viols et agressions sexuelles à l’encontre de M. P avait fait l’objet d’une ordonnance de non-lieu pour charges insuffisantes, avait été condamnée pour dénonciation calomnieuse par la Cour d’appel de Paris à trois mois d’emprisonnement avec sursis et à payer 15 000 €? de dommages et intérêts à M. P. En mars 2003, la Cour de cassation avait rejeté son pourvoi contre cet arrêt. Mme K, représentée par Me Christophe Pettiti, avait alors saisi la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH).

Pendant dix ans, l’AVFT a mené un combat pour obtenir la modification du délit de dénonciation calomnieuse, dont la rédaction était une « épée de Damoclès » au-dessus des femmes victimes de violences sexuelles, et la condamnation de l’Etat Français par la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour violation du droit à un procès équitable et du principe de présomption d’innocence dans la procédure de Mme K.

Le Parlement avait fini par modifier la rédaction du délit de dénonciation calomnieuse à la faveur de la loi du 9 juillet 2010(1).

Le 30 juin 2011, la CEDH avait condamné l’Etat français, validant ainsi les analyses de l’AVFT(2).

Mme K, toujours soutenue par l’AVFT, avait conséquemment saisi la commission de réexamen de la Cour de cassation afin qu’une Cour d’appel puisse à nouveau statuer sur la dénonciation calomnieuse.

Ce matin, Mme Kouvi, entourée des militantes de l’AVFT et assistée de son avocat, Me Colin, faisait face aux sept juges composant la commission de réexamen, dans une petite salle inhabituellement pleine(3).

Devant Mme K en larmes, le président a procédé à un rappel de la procédure et des attendus de l’arrêt de la Cour Européenne des Droits des l’Homme.

Me Colin s’est ensuite notamment exprimé sur l’importance que la justice redonne la parole à Mme K et a rappelé que l’AVFT était à l’origine de la saisine de la CEDH.

La président de la commission a demandé si Mme K s’était acquittée des 15000 €? de dommages et intérêts auxquels elle avait été condamnée. Après une réponse affirmative de son avocat, Mme K a expliqué qu’elle avait dû élever seule ses deux enfants « qui ont fait de brillantes études supérieures » au prix de grandes privations personnelles, « avec les huissiers derrière ».

L’avocat général a requis le renvoi devant une nouvelle Cour d’appel, en expliquant que la commission de réexamen avait « très peu de marge de manoe?uvre du fait des motivations de l’arrêt de condamnation de la France par la CEDH», afin que Mme K puisse être rejugée sur le fondement de la nouvelle définition du délit de dénonciation calomnieuse, dont le champ d’application a sensiblement été restreint par la loi du 9 juillet 2010.

Mme K a eu la parole en dernier : « Je m’occupe beaucoup dans la journée pour oublier(4), j’ai beaucoup de troubles. On ne voulait jamais que je parle, on ne m’a jamais accordé la parole. Lui on l’a écouté, je n’ai pas eu droit à la justice. Je suis une battante… mais j’ai dû payer cet homme pendant toutes ces années ».

Le délibéré a été rendu après une suspension d’audience.

Prochaine étape : obtenir la relaxe de Mme K devant la Cour d’appel.

Pour en savoir plus, tous les textes relatifs à cette action publiés depuis 2003.

Contact :
Marilyn Baldeck, déléguée générale

Notes

1. « relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants ».

2. Catherine Le Magueresse, juriste et ex-présidente de l’AVFT, a conçu la critique du délit de dénonciation calomnieuse. Lire ici son interview.

3. Les audiences de la Cour de cassation se tiennent généralement sans public, la procédure étant principalement écrite. Aussi les juges sont-ils souvent surpris de voir du monde dans la salle.

4. Mme K s’est fortement investie dans le combat syndical.

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