Agressions sexuelles : le Conseil de prud’hommes déboute, le tribunal correctionnel condamne

Le 21 septembre dernier, nous rendions compte d’une audience du Conseil de prud’hommes de Paris au cours de laquelle le président d’audience, Gérard Ladreit de Lacharrière, s’était illustré par son extrême misogynie à l’encontre d’une salariée victime de harcèlement sexuel et de son avocate. La décision fût à l’image du procès : selon le Conseil, il n’y avait point de harcèlement sexuel et l’employeur n’avait commis aucune faute.

Ce jugement s’appuyait notamment sur un avis de classement sans suite de la plainte pénale de la salariée, motivé pour cause de… « dossier perdu ».

Dans son jugement, le Conseil de prud’hommes s’était pourtant permis d’écrire : « Il n’y a donc pas de harcèlement sexuel et moral pour le procureur de la république », au mépris de la réalité du dossier et de la jurisprudence constante de la Cour de cassation selon laquelle la procédure prud’homale doit être indifférente au classement sans suite au pénal.

Partie civile dans la procédure pénale, l’AVFT avait découvert dans le dossier pénal une lettre de François Molins, procureur de la République de Paris, adressée à la première présidente de la Cour d’appel et à la Procureure Générale, dans laquelle on pouvait lire : « Les propos à caractère sexuel, et en outre désobligeants pour Madame M, sont inadmissibles. Ils constituent un manquement grave aux devoirs de son état de conseiller prud’homme, dans l’exercice de ses fonctions ». Ainsi que le témoignage concordant de la greffière de l’audience.

Avec les unions départementales CFDT, CGT et UNSA, nous demandions qu’une sanction disciplinaire soit prononcée à l’encontre de ce conseiller.

Parallèlement, l’AVFT avait écrit au MEDEF 75, son syndicat d’appartenance, qui nous avait répondu que celui-ci « ne figur pas sur la liste MEDEF que nous avons transmise en septembre à la Direction Générale du Travail pour le mandat à venir » sans toutefois se prononcer sur son éventuelle exclusion.

Depuis, le parquet, poussé par l’AVFT et l’avocate de la victime, avait retrouvé le dossier pénal et une audience s’est tenue le 12 octobre 2017 devant le tribunal correctionnel de Paris.

Le 22 novembre, celui-ci a prononcé la condamnation pour agression sexuelle du supérieur hiérarchique de la victime, à quatre mois d’emprisonnement avec sursis et 3000€ d’amende et a ordonné une mesure d’expertise de la victime en vue de l’évaluation de ses préjudices.
L’agresseur est également condamné à verser 3000€ de dommages-intérêts à l’AVFT en réparation de son préjudice moral.

Moralité : L’absence de condamnation n’a pas toujours à voir avec l’insuffisance de preuves, mais des prédispositions du tribunal – concrètement des hommes et des femmes qui le composent – et de la volonté de les voir… ou pas.

Marilyn Baldeck

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