Synthèse de la campagne pour la modification du délit de dénonciation calomnieuse, jusqu’en 2016

2001

5 novembre 2001, communiqué de presse : «Déboutée de sa plainte pour viol, Mme K est déclarée coupable de dénonciation calomnieuse».

2003

8 mars 2003 : communiqué de presse : « Les femmes ont-elles le droit de dénoncer les violences sexuelles qu’elles subissent ? Déboutée de sa plainte pour agressions sexuelles et harcèlement sexuel, Mme M. risque une condamnation pour dénonciation calomnieuse ».

Novembre 2003 : Forum Social Européen, distribution de 500 « appels à solidarité pour Mme K » pour prendre en charge le montant des dommages et intérêts qu’elle est condamnée à verser à l’homme qui l’a violée.

Octobre 2003 : introduction du recours de Mme K. devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour violation de l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme relatif à la présomption d’innocence.

2004

16 janvier 2004 : communiqué de presse invitant à une conférence de presse le 20 janvier : « Les femmes ont-elles le droit de dénoncer les violences sexuelles qu’elles subissent ? »
En France, une femme peut être victime de violences sexuelles, avoir le courage de les dénoncer et, si elle est déboutée de sa plainte, être condamnée pour dénonciation calomnieuse
. »

20 janvier 2004 : conférence de presse
en présence de Mme G. et Mme M., lecture du témoignage de Mme. T. Elle avait pour objet de présenter la campagne pour une modification du délit de dénonciation calomnieuse.

20 janvier 2004 : première saisine officielle de M. Perben par l’envoi d’un dossier complet sur la dénonciation calomnieuse : note analysant la construction juridique du délit de dénonciation calomnieuse (art.226-10 C. pen.), les injustices qui découlent de la rédaction de l’article, et présentant nos demandes. Cette note est accompagnée des dossiers en cours et des décisions de justice rendues.

10 février 2004 : procès de Mme D. au TGI de Dieppe. Présence de l’AVFT à l’audience. Elle est condamnée pour dénonciation calomnieuse en dépit de la présence d’un témoin oculaire des violences physiques qu’elle avait dénoncées.

13 février 2004 : procès de Mme M. à la Cour d’appel de Nîmes. Présence de l’AVFT à l’audience. Elle est condamnée. La Cour juge qu’elle n’apporte pas la preuve de sa bonne foi.

6 mars 2004 : communiqué de presse : « Le droit de dénoncer les violences sexuelles en danger. La présomption d’innocence des femmes poursuivies pour dénonciation calomnieuse bafouée. »

8 mars 2004 : deuxième lettre à M. Perben, ministre de la Justice.

7 avril 2004 : communiqué de presse : « Encore une femme condamnée !!! Le droit de dénoncer les violences sexuelles en danger. La présomption d’innocence des femmes poursuivies pour dénonciation calomnieuse bafouée. »

15 avril 2004 : réponse de M. Le Mesle, directeur du cabinet de M. Perben, ministre de la justice à nos trois lettres des 20 janvier, 7 mars, et 7 avril 2004. Ce sera l’unique réponse ou contact avec le ministère de la justice.

3 mai 2004 : réponse de l’AVFT à la lettre du directeur de cabinet.

7 mai 2004 : participation à une soirée de solidarité organisée par Mme M. à la Ciotat pour réunir les fonds nécessaires au paiement des frais de justice et du pourvoi en cassation.

18 juin 2004 : procès de Mme H. au TGI de Dijon. Présence de l’AVFT à l’audience. Interview au journal « Le bien public ». Mme H est relaxée.

7 octobre 2004 : communiqué de presse : « Encore une femme poursuivie pour dénonciation calomnieuse : « Les femmes ont-elles le droit de dénoncer les violences sexuelles qu’elles subissent ?
Déboutée de sa plainte pour viol, agressions sexuelles et harcèlement sexuel, Mme P. risque une condamnation pour dénonciation calomnieuse ».
Présence de l’AVFT au procès de Mme P, TGI de Paris.

25 novembre 2004 : communiqué de presse : « Le droit une arme pour les violeurs.
Déboutée de sa plainte pour viol, agressions sexuelles et harcèlement sexuel, Mme P. est condamnée pour dénonciation calomnieuse. »
Ecoeurée par la justice, elle n’interjettera pas appel de cette condamnation.

7 décembre 2004 : communiqué de presse appelant à un rassemblement devant le ministère de la justice : « Le droit une arme pour les violeurs. Vendredi 10 décembre, journée internationale des droits de l’homme, l’AVFT appelle à un rassemblement face au ministère de la Justice pour dénoncer la fin du droit des femmes à dévoiler les violences sexuelles ».

10 décembre 2004 : premier rassemblement devant le ministère de la justice.

2005

14 janvier 2005 : colloque au Sénat sur le harcèlement sexuel
Présentation de la proposition de loi de l’AVFT visant notamment à modifier les dispositions relatives au harcèlement sexuel et à la dénonciation calomnieuse.

25 Janvier 2005 : diffusion de l’appel à un rassemblement près du ministère de la justice le 29 janvier 05 à 15 heures.

29 janvier 2005 : 2ème rassemblement près du ministère de la justice

8 mars 2005 : 3ème rassemblement près du ministère de la justice

28 avril : rendez-vous avec Stéphane Noël, magistrat, conseiller auprès de M. Perben, ministre de la justice.
Une délégation composée de M. Baldeck et C. Le Magueresse, de l’AVFT, Mme P., adhérente de l’AVFT et victime d’une condamnation en dénonciation calomnieuse, a été reçue par Stéphane Noël, conseiller pour le droit civil et l’accès au droit au Ministère de la Justice.
Ce rendez-vous au ministère est obtenu après de 13 mois de campagne pour la modification du délit de dénonciation calomnieuse, dont 3 rassemblements devant le ministère de la Justice, et une interpellation par Marilyn Baldeck de M. Perben, ministre de la justice, lors d’une conférence publique.
M. Noël a affirmé qu’il « partageait beaucoup de nos constats » .
Il s’est engagé à :

  • « faire le point » avec Mmes Ameline, ministre de la Parité et de l’Egalité professionnelle et Guedj, secrétaire d’Etat aux droits des victimes,?
  • « transmettre ce dossier à la Direction des affaires criminelles et des grâces » et « demander que soyons reçues »,
  • « travailler à une nouvelle rédaction du délit » qu’il « soumettra à des parlementaires ».

Pour la première fois le ministère de la Justice admet que le délit de dénonciation calomnieuse doit être modifié.

Mai 2005 : communiqué de presse : « Nouvelle poursuite en dénonciation calomnieuse, nouvelle violation flagrante de la présomption d’innocence » appelant au soutien de Mme R., poursuivie devant le Tribunal de grande instance de Melun.

26 mai 2005 : audience de Mme R devant le TGI de Melun. L’AVFT est présente à ses côtés. Mme R. est condamnée

8 décembre 2005 : Communiqué de presse : « Quand la justice refuse d’être instrumentalisée par un agresseur », appelant à soutenir Mme Po. à l’occasion de l’examen par la Cour d’appel de Metz du recours formé par l’auteur désigné des violences.

5 octobre 2005, les parlementaires reçoivent la proposition de loi de l’AVFT dont une partie porte sur la modification législative du délit de dénonciation calomnieuse.

2006

13 janvier 2006 : communiqué de presse : « Condamnées pour avoir osé dénoncer les violences qu’elles subissaient » annonçant l’audience à la Cour d’appel de Paris de Mmes M et R. condamnées en première instance.

20 janvier 2006 : présence de l’AVFT à l’audience de la Cour d’appel de Paris. Mmes M et R. sont relaxées.

Mi-janvier / mi- février 2006 : rédaction d’un amendement législatif visant à modifier le délit de la dénonciation calomnieuse. Il est déposé par la sénatrice Gisèle Gautier, présidente de la Délégation au droit des femmes, dans le cadre de la proposition de loi « renforçant la prévention des violences à l’égard des femmes notamment au sein du couple ».
L’AVFT appelle à la mobilisation pour que chacun-chacune saisisse son-sa représentant-e au Sénat afin qu’il-elle vote cet amendement.
Lors du débat devant le Sénat de cet amendement le 24 janvier, Mme Gautier se rend aux arguments du ministre de la justice et retire l’amendement. L’AVFT rédige une analyse des débats devant le Sénat.
Nous tentons vainement de faire passer cet amendement devant l’Assemblée nationale.

13 février 2006, communiqué de presse : « De la présomption d’innocence des femmes victimes de violences sexuelles » annonçant l’audience de la Cour d’appel d’Aix en Provence ; c’est la quatrième audience qui se tient suite à la plainte pour dénonciation calomnieuse de l’auteur des violences (TGI d’Avignon, Cour d’appel de Nîmes, Cour de cassation, Cour d’appel d’Aix…).

20 février 2006, présence de l’AVFT à l’audience de la Cour d’appel d’Aix en Provence. Mme M. est relaxée.

12 mai 2006, communiqué de presse : « L’aberration juridique que constitue l’actuelle rédaction du délit de dénonciation calomnieuse, permet l’instrumentalisation de la justice par les agresseurs » annonçant l’audience de Mme D poursuivie pour dénonciation calomnieuse par l’agresseur après que la justice a prononcé un non-lieu à l’égard de ce dernier aux motifs qu’« une série de témoignages (qui) confirment le langage cru de M.H », mais les « pratiques perverses »décrites par Mme D. « ne sont confirmées par aucun élément matériel ». Quant aux violences contre les enfants de celle-ci, elles sont qualifiées de « plaisanteries lourdes comme le chahut dont G a fait l’objet, mais (les enfants) n’en gardent aucun trouble psychologique et ont compris que ce comportement était dénué de toute dangerosité ».
L’affaire est renvoyée à une date ultérieure.

4 octobre 2006, réponse de M. Clément à notre lettre du 13 février 2006

22 novembre 2006, réponse de l’AVFT à M. Clément, ministre de la justice.

2007

Audiences

Audience de Mmes D et M.

Le 16 février 2007, audience du Tribunal correctionnel de Bobigny. Mmes M et D sont poursuivies par le parquet pour dénonciation calomnieuse.

Elles avaient auparavant déposé des plaintes pour viols et agressions sexuelles contre leur supérieur hiérarchique. L’employeur, informé de ces plaintes, s’était engagé à mener une enquête interne et sanctionner M. X. à condition…qu’elles retirent leurs plaintes pénales. Ce qu’elles firent, leur souhait étant de pouvoir continuer à travailler -toutes deux traversent des situations personnelles très difficiles- hors la présence de M. X. M. X est effectivement licencié et part en ayant signé une transaction d’un montant de 60 000 ?.
Convoquées par la police en janvier 2007, elles apprennent qu’elles sont citées à comparaître pour dénonciation calomnieuse par le parquet, le mois suivant. Elles cherchent alors des informations sur Internet et nous contactent. Plusieurs rendez-vous permettent d’organiser leur défense assurée par Claude Katz. Le procureur expliquera cette poursuite par le fait « qu’ils en ont assez de voir des femmes déposer des plaintes pour ensuite les retirer ». Le parquet, pour résoudre ce « problème », choisit donc de sanctionner les plaignantes plutôt que de s’interroger en profondeur sur les raisons qui motivent de tel retrait de plaintes. Pour la première fois dans ce type de procédure, C. Le Magueresse est citée comme témoin pour faire part à la Cour de nos expériences et analyses sur les réactions des femmes confrontées aux violences, sur les entretiens réalisés avec ces deux femmes et faire le point sur quelques idées reçues qui transparaissaient à travers l’enquête préliminaire. Ces deux femmes ont été relaxées.

Audience Mme D.

Le 25 avril 2007, audience du Tribunal correctionnel de Bobigny (15ème chambre), Mme D est poursuivie par son agresseur pour avoir déposé une plainte après avoir vainement saisi son employeur des agissements sexuels de son employeur (voir Communiqué de presse, « L’aberration juridique que constitue l’actuelle rédaction du délit de dénonciation calomnieuse permet l’instrumentalisation de la justice par les agresseurs ».
L’avocat de M. H a plaidé que la condamnation de Mme D « résulte forcément de l’ordonnance de non-lieu définitive. (…) du fait de l’article 226-10 du Code pénal, votre tribunal est en quelque sorte une chambre d’enregistrement. Il ne peut pas refaire l’instruction ; il est privé de son pouvoir d’appréciation ». « Cet article, il existe, il est d’application en France, il n’a pas été abrogé ». Ainsi l’avocat adverse expose-t-il les raisons pour lesquelles nous dénonçons l’actuelle rédaction du délit de dénonciation calomnieuse et en demandons la modification.

Action en direction du président de la République

Lettre et mail de rappel à N. Sarkozy en janvier 2007 à l’occasion de l’envoi du livre de l’AVFT
Nous avons de nouveau saisi le président de la République pour lui rappeler les engagements pris oralement lors de la 6ème rencontre des associations de victime et d’aide aux victimes
Nous n’avons pas reçu de réponse.

Actions en direction du ministère de la justice

Le 6 juillet 2007, Catherine Le Magueresse interpelle la ministre de la justice, Mme Dati, à l’occasion de la 7ème rencontre avec les associations d’aide et de victimes à l’école des officiers de la gendarmerie nationale de Melun, sur le thème : « L’accueil et l’accompagnement des victimes ». L’enjeu d’une modification du délit de dénonciation calomnieuse lui est brièvement présenté. L’écoute est polie et…impatiente. La ministre nous invite à contacter son conseiller « victime ».

Le 19 septembre 2007, Marilyn Baldeck et Catherine Le Magueresse ont rencontré François Guéant, conseiller technique pour « les droits des victimes » de la ministre de la justice, Rachida Dati, pour lui faire part de nos analyses et demandes par rapport au droit et à la justice.
La campagne pour une modification du délit de dénonciation calomnieuse était un des points à l’ordre du jour. Nous avons rappelé les engagements pris par ses prédécesseurs, et notamment par Stéphane Noël, aujourd’hui directeur adjoint de cabinet la lettre que nous avions alors envoyée.
M. Guéant s’est montré pour le moins réservé (« ma religion n’est pas faite sur ce sujet. Ce serait un cavalier parlementaire qui ferait tomber tout un texte ! ») et nous a fait part des fortes réticences des juristes du ministère. Il s’est seulement engagé à organiser une réunion pour que nous puissions « comprendre nos points de vue réciproques » !!! Cette réunion n’a pas eu lieu.

Intervention lors d’une réunion de travail au cabinet de Madame Létard, secrétaire d’Etat à la solidarité

Cette réunion avait pour objectif de recueillir les observations des associations travaillant sur les droits des femmes sur le projet de plan d’actions 2008.
Constatant la disparition, dans le document soumis pour la réunion, d’une des mesures qui portait précisément sur la modification du délit de dénonciation calomnieuse, Catherine Le Magueresse en a demandé les raisons. Le directeur de cabinet a expliqué que le cabinet de la ministre de la justice s’opposait à cette modification « au nom de l’élément intentionnel ». Selon eux, l’obligation de caractériser l’intentionnalité de la dénonciation calomnieuse (« elle savait qu’elle mentait ») offre suffisamment de garanties pour ne pas risquer des condamnations injustes. Si le raisonnement peut être valable pour de nombreuses situations, il ne tient pas lorsque la personne poursuivie pour dénonciation calomnieuse a dénoncé des violences sexuelles dont elle est directement victime. Les magistrat-e-s considèrent qu’elle ne peut, de bonne foi, avoir dénoncé des violences sexuelles pour lesquelles la justice a dit que judiciairement elles n’avaient pas eu lieu.
L’application du délit de dénonciation calomnieuse aux victimes (non reconnues) de violences sexuelles a des conséquences spécifiques pour les dites victimes. Parce que ces conséquences ne sont pas prises en compte, ce délit est indirectement discriminatoire et restreint le droit de déposer une plainte.

Nous avons également saisi la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour une tierce intervention dans la procédure de Mme K

2008

Le 1er avril 2008, Gisèle Amoussou et Marilyn Baldeck sont auditionnées par l’inspection générale de l’administration, l’inspection générale de la police nationale, l’inspection générale des services judiciaires et l’inspection générale des affaires sociales dans le cadre de l’évaluation du « plan global triennal 2005-2007 de lutte contre les violences faites aux femmes ». Marilyn Baldeck expose les fondements de la campagne de l’AVFT pour la modification du délit de dénonciation calomnieuse.

Juillet 2008 : Publication du rapport des inspections (cf. audition 1er avril). Dans ses « recommandations pour améliorer le second plan global 2008-2010 », il est recommandé e conduire une « réflexion » sur des modifications législatives portant notamment sur « l’incrimination de dénonciation calomnieuse qui est de plus en plus souvent utilisée par les auteurs de harcèlement sexuel pour se retourner contre leur victime lorsqu’elle n’a pas pu obtenir gain de cause, faute, par exemple, de preuves jugées suffisantes ». (p. 52).

22 septembre 2008, rencontre entre Dominique Simon-Peirano, Conseillère chargée de la parité et des droits des femmes auprès de Valérie Létard et Marilyn Baldeck, dans la perspective d’une « loi globale pour les femmes », « envisagée pour 2009 ». La dénonciation calomnieuse est à l’ordre du jour.

23 septembre 2008, audience du Tribunal correctionnel d’Amiens. Mme Pz est poursuivie pour dénonciation calomnieuse, après que sa plainte pour viol et violences volontaires contre son ex-compagnon a fait l’objet d’une ordonnance de non-lieu partiel : la juge d’instruction a renvoyé le mis en cause devant le tribunal correctionnel pour les violences volontaires tandis qu’elle a ordonné le non-lieu sur le viol, laissant donc penser que le consentement de Mme Pz aux « actes sexuels » était compatible avec le fait qu’elle ait été (très violemment) molestée, comme en attestait le rapport des urgences médico-judiciaires.
L’AVFT soutient Mme Pz depuis plusieurs années. Marilyn Baldeck était présente pour la soutenir. Au terme de débats très éprouvants pour Mme Pz, qui était défendue par Me Ovadia, le prévenu a été condamné pour violences volontaires et Mme Pz a été relaxée du chef de dénonciation calomnieuse.

1er octobre 2008, réunion de la Commission nationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Marilyn Baldeck a souligné les recommandations émises dans le rapport des inspections générales relatives à la modification du délit de dénonciation calomnieuse.

2009

28 avril 2009, audition de Marilyn Baldeck par la mission parlementaire d’évaluation de la politique de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes.

Juillet 2009, publication du rapport de la mission parlementaire d’évaluation de la politique de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes.
Le mission recommande la modification du délit de dénonciation calomnieuse (Cf. Troisième partie de ce rapport, intitulée « Faciliter l’accès des victimes au droit« , chapitre 2, « Eliminer les freins à l’accès au droit« , article « La dénonciation calomnieuse, « épée de damoclès » au dessus de la tête des victimes, p. 165 à 172« ).

La mission reprend à son compte l’analyse de l’AVFT : « Cependant, dans certaines circonstances, l’élément moral découle de la nature même des faits en question. Comment une femme qui a dénoncé un viol, qui, de manière irréfragable n’a pas eu lieu (pour peu qu’une décision définitive ait été rendue), peut-elle être considérée comme étant de bonne foi ? Comment peut ne pas avoir eu connaissance de la fausseté des faits dénoncés ? »
(…)
« Plusieurs jugements font effectivement découler l’élément intentionnel de la nature des faits en question« .

La mission, en revanche, exclut la suppression de l’alinéa 2 demandée par l’AVFT, ce qui selon, elle « remettrait trop en cause l’autorité de la chose jugée », mais se positionne pour sa modification. Daniel Guérin, conseiller à la chambre criminelle de la Cour de cassation, interrogé sur ce point, suggère qu’il « faudrait trouver une rédaction qui permette de dire que la présomption de fausseté des faits n’existe pas lorsque le juge a un doute sur leur réalité. On éviterait, par cette voie, les plaintes systématiques de dénonciation calomnieuse car celui qui a été accusé s’exposerait à un nouveau débat sur la même question. J’y verrais, en tant que membre de la chambre criminelle, un moindre inconvénient et même, à titre personnel, un avantage car je trouverais dommage d’abroger purement et simplement cet article« .

La mission conclut ainsi : « De cette manière, les juges du premier procès pourraient, en relaxant le mis en cause au bénéfice du doute ou en rendant une ordonnance de non-lieu pour défaut de charges, avoir la certitude que leur décision, fondée sur le respect de la présomption d’innocence, ne pourra pas servir de fondement à une présomption d’existence de l’élément matériel du délit de dénonciation calomnieuse.

Proposition n°37 :
Modifier la définition du délit de dénonciation calomnieuse afin que le juge puisse apprécier l’élément matériel du délit en cas d’acquittement ou de relaxe au bénéfice du doute, ou de non-lieu prononcé pour insuffisance de charges ».

Autrement dit, la mission propose qu’en cas où la plaignante aurait été déboutée « pour charges insuffisantes » ou parce que le doute a bénéficié au mis en cause, la décision d’acquittement, de relaxe ou de non-lieu ne pourrait tenir lieu d’élément matériel du délit de dénonciation calomnieuse.

La mise en oeuvre d’une telle proposition, à supposer qu’elle soit suivie d’effet, demeure floue : Revient-elle à ce que le juge saisi d’une plainte pour dénonciation calomnieuse suite à une relaxe pour charges insuffisantes fonde sa décision non plus sur le 2ème alinéa de l’article 226-10 CP (« La fausseté du fait dénoncé résulte nécessairement de la décision, devenue définitive, d’acquittement, de relaxe ou de non-lieu déclarant que la réalité du fait n’est pas établie ou que celui-ci n’est pas imputable à la personne dénoncée« ) mais sur le 3ème alinéa : (« En tout autre cas, le tribunal saisi des poursuites contre le dénonciateur apprécie la pertinence des accusations portées par celui-ci« ) ?

Cette proposition, même si elle réduit le risque de condamnation pour dénonciation calomnieuse de victimes de violences sexuelles déboutées de leur plainte (car, pour l’essentiel, elles le sont pour « charges insuffisantes »), elle n’en demeure pas moins loin d’être satisfaisante.

En effet, elle ne supprime pas la rédaction d’un alinéa qui viole manifestement la présomption d’innocence des personnes poursuivies pour dénonciation calomnieuse dont les plaintes auraient fait l’objet d’une décision de relaxe pure et simple. Or rien ne justifie, pas même « l’autorité de la chose jugée », qu’elles ne bénéficient pas de la présomption d’innocence.

7 octobre 2009, Marilyn Baldeck et Laetitia Bernard rencontrent Natacha Djani-Cailleau, conseillère auprès de Nadine Morano, secrétaire d’Etat chargée de la famille et de la solidarité. La campagne de l’AVFT pour la modification du délit de dénonciation calomnieuse est un des points traités.

9 octobre 2009, lettre de Marilyn Baldeck à Daniel Guérin, conseiller à la Cour de Cassation, sur la dénonciation calomnieuse.

2010

1er juin 2010, audition de Marilyn Baldeck par le groupe socialiste du Sénat. L’analyse de l’AVFT sur le délit de dénonciation calomnieuse est présentée.

20 avril 2010, la Cour de Cassation publie son rapport annuel 2009. Il préconise une modification législative du délit de dénonciation calomnieuse.

9 juillet 2010 : vote de la loi « relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants« . Le délit de dénonciation calomnieuse est modifié.
L’alinéa 2 dispose désormais : « La fausseté du fait dénoncé résulte nécessairement de la décision, devenue définitive, d’acquittement, de relaxe ou de non-lieu, déclarant que le fait n’a pas été commis ou que celui-ci n’est pas imputable à la personne dénoncée ».

2011


30 juin : La CEDH condamne la France pour violation du principe de présomption d’innocence et du droit à un procès équitable.

2012

La Cour de cassation de réexamen casse l’arrêt de condamnation de Mme K. et renvoie devant une nouvelle Cour d’appel.

2016

14 octobre : Mme K. est relaxée du délit de dénonciation calomnieuse. L’État français est condamné à l’indemniser.

Questions écrites déposées par des parlementaires

  • Question n°11794 du 22 avril 2004 de M. Claude Saunier, sénateur, au garde des sceaux
  • Mai 2004, question de Mme Joissains-Masini, députée, au garde des sceaux
  • Question n°42 397 du 29 juin 2004 de Muguette Jacquaint, députée, au garde des sceaux. La réponse du ministre publiée au Journal officiel du 21 décembre 2004, ne répond pas à la question.

Campagne soutenue par de nombreuses associations

CFCV (Collectif Féministe contre le Viol), Femmes Solidaires, CNDF (Collectif National des Droits des Femmes), ECVF (Elu-e-s Contre les Violences faites aux Femmes), FNSF (Fédération Nationale Solidarité Femmes), MFPF (Mouvement Français pour le Planning Familial), UFM (Union des Femmes de Martinique), MJF (Mouvement Jeunes Femmes), FNSF (Fédération Nationale Solidarité Femmes), Les Chiennes de Garde, SOS Femmes Accueil, Du côté des Filles, CODIF(Centre d’Orientation Documentation, Information des Femmes), ASFAD (Association de Solidarité avec les Femmes Algériennes Démocrates), Forum Femmes Méditerranée, MAPP (Mouvement pour l’Abolition de la Prostitution, de la Pornographie), CFL (Coordination Féministe et Laique), la CADAC (Coordination des Associations pour le Droit à l’Avortement et à la Contraception), la CLEF (Coordination pour le Lobby Européen des Femmes), NPNS (Ni Pute Ni Soumise), MixCité, VDAY EUROPE, Coordination Lesbienne en France, Emission « Femme Libre » (Radio Libertaire), SOS Sexisme, l’ADIS (Association de Défense des Intérêts du Sport), l’Assemblée des Femmes, Collectif de Pratiques et de Réflexions Féministes « Ruptures ».

Pétition « Pour une modification du délit de dénonciation calomnieuse » signée électroniquement sur le site « www.lapétition.com » ou en version papier, par plus de 2 000 personnes.

Interventions lors de réunions publiques (colloques, commissions, séminaires):

23 mars 2004 : Présentation de la campagne dénonciation calomnieuse lors de la réunion de la commission violences du Collectif national des droits des femmes.

20 avril 2004 : réunion de travail au ministère de la parité et de l’égalité professionnelle, en présence de Mme Ameline, ministre. Intervention de Marilyn Baldeck sur la dénonciation calomnieuse. Selon Mme Ameline, « il s’agit d’un vaste chantier à ouvrir ».

29 avril 2004 : sous-commission sur « l’accueil des femmes victimes et la procédure policière », intervention de C. Le Magueresse portant notamment sur la dénonciation calomnieuse.

15 juin 2004 :
Café féministe, débat animé par Catherine Lafon, intervention de C. Le Magueresse portant notamment sur la dénonciation calomnieuse.

22 juin 2004 : quatrième rencontre nationale avec les associations de victimes. Intervention de l’AVFT sur la dénonciation calomnieuse sous la forme d’une demande adressée à M. de Villepin, ministre de l’intérieur et à Mme Guedj, secrétaire d’Etat aux victimes. Après un échange, M. de Villepin conclu « si j’ai bien compris, il faut supprimer ce ‘nécessairement’ qui n’est pas nécéssaire ».

16 novembre 2004 : audition de C. Le Magueresse par la Délégation Femmes du Sénat dont le thème de travail est les violences à l’encontre des femmes. Une partie de l’intervention a porté sur la campagne.

25 novembre 2004 : commission nationale contre les violences envers les femmes réunie sous l’égide de Mme Ameline, ministre de la parité et de l’égalité professionnelle. Intervention de C. Le Magueresse sur la dénonciation calomnieuse.

26 novembre 2004 : colloque du syndicat de la magistrature. Intervention de C. Le Magueresse sur la dénonciation calomnieuse.

17 décembre 2004 : première Agora de l’Egalité des chances entre les femmes et les hommes, participation de l’AVFT à la table ronde sur les violences sexistes. Intervention de C. Le Magueresse portant notamment sur la dénonciation calomnieuse

4 avril 05 : colloque « La victime et le procès pénal » organisé par la secrétaire d’Etat aux droits des victimes, Mme Guedj. Intervention de C. Le Magueresse sur le caractère illusoire des droits des victimes tant qu’existera le délit de dénonciation calomnieuse dans sa rédaction actuelle.

12 mai 2006, Marilyn Baldeck intervient sur le délit de dénonciation calomnieuse à l’Université de Bourgogne dans le cadre du colloque : « Pratique du droit, pensée du droit et engagement social ».

30 janvier 2008, Marilyn Baldeck intervient notamment sur le délit de dénonciation calomnieuse lors d’une audition par l’Observatoire de la parité du Premier ministre.

13 novembre 2008, lors d’une intervention à l’Université Libre de Droit de Lille, Marilyn Baldeck évoque l’atteinte à la présomption d’innocence contenue dans la rédaction du délit de dénonciation calomnieuse.

Médias

TF1, Journal Télévisé de 20 heures, 29 janvier 2005, reportage sur le rassemblement du 29 janvier.

Radio Libertaire, émission « Femmes libres »
: en 2004 : Gisèle Amoussou et C. Le Magueresse, en janvier 05 : Marilyn Baldeck et Emmanuelle Cornuault.

Articles :
Clara Magazine, n° 81,
12 janvier 2004
Lettre d’Info de l’Espace Simone de Beauvoir Nantes, n°60
La revue parlementaire, article de C. Le Magueresse sur la nécessaire modification du délit de dénonciation calomnieuse
L’humanité Hebdo, « Le Code pénal, refuge pour le sexisme ? », Catherine Lafon. 29 et 30 janvier 2005
Clara magazine, , « Le scandale de la dénonciation calomnieuse », de Marie Barbier, 8 juillet 2005
Le Républicain Lorrain, « Une vie entre parenthèses » de B. Phlaum, 14 décembre 2005

En outre, d’autres actions ont été menées par des adhérent-es de l’AVFT, des proches de femmes poursuivies pour dénonciation calomnieuse ou par des femmes poursuivies elles-mêmes.

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