En effet, l’AVFT a appris mardi 18 février que sa subvention déjà insuffisante serait diminuée pour 1997.
Madame Neiertz, Députée, informée en janvier 1997 de la décision de suppression de la subvention de l’AVFT, a demandé le 18 février au gouvernement, dans le cadre des questions orales, « de mettre son action en accord avec ses propos ». Elle a rappelé que Madame Couderc, Ministre déléguée à l’emploi et chargée des droits des femmes, avait déclaré le 02 juillet 1996 : « la lutte contre le harcèlement sexuel (reste) au coeur des actions de l’État » . Elle l’avait également assurée « de l’intérêt porté par les pouvoirs publics à l’action de l’AVFT ».
Monsieur Gaymard, Secrétaire d’État, a répondu au nom de Madame Couderc :
« les priorités du gouvernement sont l’emploi, la formation, l’égalité professionnelle et la promotion sociale. (…) L’AVFT recevra en 1997 un premier versement de 600 000 francs qui pourra être suivi d’une attribution complémentaire selon les disponibilités budgétaires ».
Rappel des faits :
En décembre 1996, – pour la dixième année consécutive- l’AVFT déposait au service des droits des femmes, une demande de subvention pour 1997.
Le 16 janvier, elle apprenait la suppression intégrale de sa subvention de 700 000F, soit 80 % de ses ressources. En conséquence, elle engageait le licenciement de ses salariées et demandait au gouvernement de revenir sur sa décision.
Le 20 janvier, l’AVFT était informée que : « la décision n’était pas arrêtée », « des arbitrages étaient en cours », « nous aurions quelque chose ».
L’AVFT indiquait alors qu’un minimum de 940 000 F. était nécessaire pour rémunérer les quatre salariées et régler les frais de fonctionnement incompressibles de la permanence (loyer, téléphone, frais postaux, déplacements, frais d’avocat-es).
Si le montant de la subvention est maintenue à 600 000 F, l’AVFT devra supprimer un poste voire un poste et demi de travail. Amputée de plus du tiers de ses effectifs, l’AVFT devra :
réduire sa permanence téléphonique et établir une liste d’attente pour les nouveaux dossiers. Cela, alors même que les demandes d’intervention des personnes victimes de discriminations et de violences ( viol, agression sexuelle, harcèlement sexuel) sur leurs lieux de travail ne cessent de croître ; selon une étude de l’INSEE publiée en décembre 1996, 13 % des personnes agressées l’ont été sur leur lieu de travail.
cesser ses publications : trois livres en huit ans (« De l’abus de pouvoir sexuel », « Le droit de cuissage » de Marie-Victoire Louis et « Le harcèlement sexuel en France » de Sylvie Cromer), 5 numéros de « Projets féministes » et neuf numéros de « La lettre de l’AVFT » en quatre ans.
cesser ses recherches sur les violences.
cesser la gestion de son centre de documentation, consulté par des avocat-es, des syndicalistes, des inspecteur-trices du travail, des chercheur-es, des étudiant-es.
Force est de constater que les déclarations de Madame Couderc sur la nécessité « de renforcer les actions contre les violences faites aux femmes », ne sont pas suivies d’actes, en matière de violences au travail.
Le gouvernement cherche à faire de l’AVFT une simple structure d’information. Il nie la spécificité de son action. En effet, depuis sa création en 1985, l’AVFT accompagne les victimes d’agressions sexuelles dans l’ensemble de leurs démarches, saisit leurs employeurs, les inspecteur-trices du travail, se constitue partie civile, développe la prévention grâce à ses actions de formation, et contribue à la mise en oeuvre des lois sur le harcèlement sexuel, rétablissant ainsi des centaines de femmes dans leurs droits et dignité.
A cet égard, l’AVFT récuse formellement le chiffre annoncé par Madame Couderc : « l’AVFT a reçu 170 appels par écoutant en 1996, à comparer par exemple aux 5 000 appels adressées aux permanences de l’association « Violences conjugales » ». Ce chiffre correspond approximativement aux nouveaux cas révélés en 1996 par écoutante mais il n’intègre pas les appels nécessaires au suivi des dossiers, soit en moyenne 2300 appels annuels. Réduisant son action à une permanence téléphonique, il révèle une méconnaissance totale du fonctionnement de l’AVFT.
L’AVFT dénonce la discrimination dont elle est l’objet, puisque elle est la seule structure parmi les associations luttant contre les violences à voir son budget diminué et à ne pas bénéficier d’une convention pluriannuelle qui lui permettrait de concevoir son action dans une perspective à moyen terme.
Tout choix budgétaire étant un choix politique, l’AVFT demande que les critères d’affectation des subventions aux associations de l’ensemble des ministères soient rendus publics.
A l’heure où la précarité de l’emploi augmente, l’AVFT demande au gouvernement quelles actions concrètes il compte mettre en oeuvre pour lutter contre les discriminations et les violences au travail qui concernent une femme sur cinq et conduit dans l’immense majorité des cas à leur exclusion de l’emploi.
L’AVFT est soutenue par des partis : le Parti Communiste, le Parti Radical-Socialiste, le Parti Socialiste, les Verts ; des syndicats : la C.G.T., l’UGICT-CGT, Sud-PTT, la STEFI-CFDT ; des élu-es: Mmes Ben Guiga, Joëlle Dusseau, Danielle Pourtaud, Yvette Roudy, Aline Pailler, des personnalités : Élizabeth Badinter, Françoise Gaspard, Annie Junter-Loiseau, Michael Rubenstein, Régine Saint-Criq, Catherine Tasca, des associations françaises et étrangères : le Collectif National pour les Droits des Femmes, l’association Parité, les Pénélopes, la Fédération Abolitionniste Internationale, UFF-Femmes Solidaires, Groupe d’Aide et d’Information sur le harcèlement sexuel au travail (Québec), Université des femmes (Bruxelles), Viol Secours (Genève), des avocat-es, des inspecteurs-trices du travail et des personnes victimes de discriminations et de violences sexuelles ou sexistes au travail.