Lettre à Marie-Laure Sauty de Chalon, PDG d’aufeminin.com

Marie-Laure Sauty de Chalon
Présidente Directrice Générale
aufeminin.com
78 avenue des Champs-Elysées
75008 Paris

Paris, le 29 décembre 2010

Par courrier postal et par mail

Madame,

J’ai participé le 23 novembre dernier à la table-ronde organisée à l’Observatoire de la Parité entre les Femmes et les Hommes, dont vous êtes membre du conseil d’administration, autour du questionnaire sur les violences faites aux femmes réalisé par le site Internet aufeminin.com, dont vous êtes la rédactrice en chef. J’ai relayé aux invitées à cette table-ronde des éléments d’analyse issus de vingt-cinq années d’expérience de l’AVFT sur la question des violences sexistes et sexuelles dont les femmes sont victimes au travail. Comme je l’avais précisé, l’AVFT tient notamment sa légitimité à critiquer le droit applicable à ces violences de ses très régulières actions en justice auprès des victimes, devant les juridictions pénales aussi bien que prud’homales.

Vous aviez objecté, en réponse à mon intervention, que les entreprises agissaient efficacement contre le harcèlement sexuel, notamment du fait de la pression syndicale, et que les Conseils de prud’hommes étaient « extraordinairement sévères à l’encontre des employeurs », constats avec lesquels je n’ai pu que me démarquer. L’AVFT n’a en effet pas connaissance d’entreprises françaises, quelle que soit leur taille, ayant mis en place une politique volontariste de prévention du harcèlement sexuel et de traitement des plaintes ; Les syndicats, à l’exception, depuis deux ans, de l’Union Départementale CFDT Paris(1), n’en ont jamais fait une priorité; Quant aux Conseils de prud’hommes, leur organisation paritaire en collèges « salariés » et « employeurs », et au demeurant, la quasi-absence de formation et de sensibilisation sur ces questions des conseillers prud’hommes expliquent la très faible prise en compte des droits de la salariée victime dès ce niveau de juridiction.

Dans l’article qui a suivi cette table-ronde publié sur aufeminin.com, qui consiste en un compte-rendu partiel des échanges qui ont eu lieu, vous déclarez : « Il existe déjà de nombreux dispositifs mis en place par les entreprises pour lutter notamment contre le harcèlement sexuel mais il faut pouvoir oser exprimer le méfait dont on a été victime. Et ce n’est pas toujours aussi simple(2) ».

Dénoncer les violences sexistes ou sexuelles n’est en réalité jamais simple pour les salariées qui en sont victimes, très souvent l’objet de railleries et de surcroît victimes d’une transfert des responsabilités (« elle l’a peut-être un peu cherché », « elle aurait dû lui mettre une gifle », « elle est vraiment trop sensible » etc.), singulièrement dans les entreprises qui, en violation de leurs obligations légales, n’ont pris aucune mesure préventive du harcèlement sexuel et n’ont pas clairement affiché leur intolérance à ce type d’agissements.

Agréée organisme de formation, l’AVFT a le souci de rechercher, souvent vainement, des exemples de « bonnes pratiques » françaises en matière de lutte contre le harcèlement sexuel -qui ne se limiteraient pas à l’élaboration d’une « charte » – afin d’enrichir le contenu desdites formations. Je vous serais par conséquent très reconnaissante de bien vouloir nous indiquer quels sont les dispositifs et quelles sont les entreprises que vous évoquiez.

L’AVFT apportera bien entendu son concours à un éventuel dossier spécial d’aufeminin.com sur le harcèlement sexuel et les violences sexuelles au travail, que vous aviez projeté lors de notre rencontre.

Dans cette perspective, je joins à la présente « Violences sexistes et sexuelles au travail, guide à l’attention des employeurs », ouvrage publié par l’AVFT avec le soutien financier de la Direction Générale du Travail.

Vous souhaitant bonne réception de la présente et une très heureuse année 2011, je vous prie d’agréer, Madame, l’expression de mes salutations distinguées.

Marilyn Baldeck
Déléguée générale


PS : Cette lettre a fait l’objet d’une réponse en date du 21 janvier 2011 et publiée sur le site.


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